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Administration justice

La justice seigneuriale, distinguée en haute, moyenne et basse justice, constitue un mode d'organisation médiéval du système judiciaire, à l’œuvre dans la plupart des États européens. On estime à environ 20 000 à 30 000 le nombre des cours de justice seigneuriale dans tout le royaume de France à la veille de la Révolution. Elles constituaient la base de l'organisation judiciaire, avec les prévôtés (justices royales subalternes), supprimées pour ces dernières au milieu du XVIIIe siècle.

Rôle

La justice seigneuriale a une importance primordiale au sein du village. Elle arbitre d'une part les conflits entre paysans, et d'autre part entre ceux-là et le seigneur. Dans ce dernier cas, elle n'est compétente qu'en matière de droits seigneuriaux, car pour toute autre cause, le seigneur doit se pourvoir devant une justice autre que la sienne.

À l'origine, le seigneur peut ainsi asseoir sa domination sur ses terres, mais cette possibilité n'a plus guère de réalité à partir du XVIe siècle, alors que le pouvoir royal restreint peu à peu les prérogatives seigneuriales. À la fin de l'Ancien Régime, la justice seigneuriale correspond plutôt à ce que l'on appellerait de nos jours une « justice de proximité », mais elle n'a plus alors d'importance réelle que pour des affaires mineures. En dépit d'une légende noire persistante, les justices seigneuriales, aux XVIIe et XVIIIe siècles, rendent des services indiscutables dans les campagnes car elles sont rapides, accessibles aux justiciables, peu coûteuses et équitables, selon l'opinion de la plupart des spécialistes modernes[réf. nécessaire] qui se sont penchés sur leurs archives.

Historique et évolution

La justice seigneuriale est issue de la féodalité et se caractérise par une délégation du pouvoir royal aux seigneurs, le roi étant juridiquement la source de toute justice (une justice qu'au XVIIIe siècle Louis IX rend encore personnellement à l'occasion pour ses propres domaines). La justice seigneuriale, moins lente et donc moins coûteuse que la justice royale, géographiquement plus proche des justiciables, permet également la diffusion des ordonnances et édits royaux au niveau local, ainsi que l’application des redevances seigneuriales (cens, banalités, droits de mutation, champart, saisine). Les seigneurs ont aussi un rôle de police administrative concernant les poids et mesures, la voirie, le contrôle des prix, les marchés, le fermage, les droits de passage. La possession de la justice constituant un important élément de prestige, les seigneurs n’hésitent pas à planter des poteaux de justice armoriés, qui permettent de marquer les limites territoriales de la seigneurie.

Jusqu'au XVIe siècle, la cour seigneuriale est présidée par le seigneur, ou l’un de ses représentants : prévôt, bailli, sénéchal ou simple juge. Le seigneur ne juge plus personnellement depuis le XVIe siècle. Il est alors tenu de nommer un juge possédant des compétences juridiques reconnues (diplôme d'une faculté de droit), être pourvu de gages suffisants, et avoir été agréé par la juridiction royale dont il dépend.

La Révolution française de 1789 supprime les justices seigneuriales et leur substitue les justices de paix (loi des 16 et 24 août 1790) qui fonctionneront dans chaque chef-lieu de canton jusqu'en 1958.

Les trois niveaux de justice seigneuriale

On distingue trois degrés de justice seigneuriale, évoqué dans divers textes (par ex. la Coutume de Saintonge, dans le Sud-Ouest, en 15202) :

Justice haute (ou haute justice)

Le seigneur (ou plus exactement le juge seigneurial) peut juger toutes les affaires et prononcer toutes les peines, dont la peine capitale (d'où le nom de jus gladii, litt. « droit de l'épée »), celle-ci ne pouvant toutefois être exécutée qu'après confirmation par des juges royaux (appel obligatoire, porté devant les parlements). La haute justice jouit de la plénitude de juridiction au civil comme au pénal.

Justice moyenne (ou moyenne justice)

Le seigneur peut juger les rixes, injures et vols. Les délits ne peuvent être punis de mort. Pratiquement, la moyenne justice joue un rôle important au civil, notamment en matière de successions et de protection juridique des intérêts des mineurs : apposition de scellés, inventaire des biens des mineurs, nomination des tuteurs, etc.

Justice basse (ou basse justice)

Le seigneur peut juger les affaires relatives aux droits dus au seigneur, cens, rentes, exhibitions de contrats et héritages sur son domaine. Il s'occupe aussi des délits et amendes de faibles valeurs (dégâts des bêtes, injures, amendes inférieures à 7 sols 6 deniers). Il doit posséder sergent et prison afin d'y enfermer tout délinquant avant de le mener au haut justicier. Si la seigneurie est assez grande pour qu'il y ait des vavasseurs, les affaires de moyenne et basse justice sont jugées par leurs soins.

Composition du tribunal

Le tribunal seigneurial se compose, théoriquement, de trois personnes :

  • Le juge, appelé parfois prévôt, bailli, sénéchal, vice-gérant, ou viguier selon les régions, qui prononce la sentence.

  • Le procureur fiscal, qui représente le ministère public et engage les poursuites.

  • Le greffier, qui transcrit les jugements et tient les archives de la justice.

Parfois, la justice seigneuriale est plus étoffée, généralement quand son ressort est étendu géographiquement, et son activité importante. On y rajoute alors :

  • Le juge des appellations, qui juge en appel.

  • Le lieutenant de justice, adjoint du juge, qui le remplace le cas échéant dans ses fonctions.

  • Le substitut du procureur, adjoint du procureur fiscal.

  • Le sergent, aux fonctions proches de celles des huissiers actuels, existe obligatoirement dans les hautes et moyennes justices, et souvent en fait dans les basses justices. C'est lui qui, notamment, doit remettre aux justiciables les assignations devant le tribunal.

Le seigneur est tenu de posséder un auditoire où rendre la justice, voir Audience (architecture) et une prison avec geôlier, qui doivent être maintenues en bon état.

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Procédure judiciaire concernant la mort de Phélip Ardisson (1697-1712)

A Monsieur le juge de Cannes, ou son lieutenant, Supplie humblement Maître Hubert Ardisson, notaire, habitant en ce lieu de Cannes, Remontre que le 17 décembre dernier après midi, Phélip Ardisson, son fils âgé d’environ 14 ans, étant sorti de sa maison pour aller au collège, passant le long de la Marine, et ayant trouvé un groupe de jeunes enfants au devant la maison de feu Jean Aubin, bourgeois, qui jouaient ensemble, il s’arrêta pour voir le jeu. Un des enfants le poussa, et Phélip Roustan, fils de patron Claude, prit une grosse pierre, ou morceau de plâtre et en donna malicieusement un gros coup sur le côté de Phélip Ardisson qui, après avoir fait quelques pas, tomba mort sur place de ce fatal coup. Affolé, le fils Roustan prit la fuite. Jusqu’à présent, on a prit soin de cacher au suppliant la cause de la mort de son fils. Mais après en avoir découvert la nature, cela l’oblige d’en faire informer, requérant provision. Ce considéré, il vous plaise, Monsieur, ordonner que sur ce que dessus, et qu’en dépend, il en sera par vous informé, pour l’information prise et communiquée au procureur juridictionnel, y être pourvu, et parce qu’il n’a pas une entière connaissance des témoins et que le crime est grand, il vous plaise, Monsieur, lui permettre de se pourvoir par censure ecclésiastique, sans préjudice d’agir contre qui de droit pour ces dommages, intérêts, et sauf ses autres fins, et sera justice.

Ardisson

Sera par nous informé sur ce que dessus et qu’en dépend, et à ces fins, ait l’ajournement contre les témoins requis, et au surplus, permettons au suppliant de se pourvoir par censure ecclésiastique si besoin est.

Fait à Cannes, le 5 janvier 1713. Riouffe, lieutenant de juge

 

Information prise à la requête de Maître Hubert Ardisson de ce lieu, querellant, contre Philip Roustan, fils de patron Claude, querellé.

Du 31 janvier 1713, à Cannes, dans la chambre du greffe, suivant la permission de la cour, et par devant nous, Pierre Chiris, avocat en la cour, juge de l’abbaye, constitué en personne, Jully Ferré, matelot de ce lieu, âgé d’environ 42 ans, témoin assigné par exploit du jour d’hier fait par Allieis, huissier, dûement contrôlé à Cannes, signé Preyre, dont il nous a exhibé la copie, à la requête d’Hubert Ardisson, jadis notaire royal, querellant en meurtre et homicide commis en la personne de Philip Ardisson, son fils, dont mort s’en est ensuivie contre Philip Roustan, fils de patron Claude, querellé, lequel Ferré, témoin, moyennant serment, et ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique des parties : Dépose ne savoir rien du contenu en la dite requête ; Et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquis suivant l’ordonnance.

 

Déposition de Bernarbé Albert, maître d’école à Cannes, âgé d’environ 46 ans, originaire de Toulon. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, par devant qui dessus, constitué en personne, Albert, témoin assigné par le susdit exploit, dont il nous a exhibé la copie, moyennant serment, ouï tant à charge que décharge sur son contenu dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique des parties : A dit savoir qu’au mois de décembre dernier, Ardisson, querellant, vint trouver le déposant, et lui demander si le jour concerné, Philip Roustan, fils de Claude, venait à l’école. Lui ayant répondu qu’il allait chez monsieur Raybaud, prêtre, pour apprendre le latin, Ardisson lui demanda encore si Antoine Roustan, parent du querellé savait comment s’était passé le coup dont Philip Ardisson fut tué. L’écolier interrogé déclara qu’il avait vu Philip Roustan donner un coup de plâtras à Philip Ardisson. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et s’est soussigné. Chiris, juge Albert Roustan, greff

 

Déposition de Jean Peillon, du lieu de Mouans, maître de la petite école de ce lieu, âgé d’environ 56 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Peillon, témoin assigné par le même exploit, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique des parties : Dit savoir qu’un jour du mois de décembre dernier, faisant sa classe, Jacques Arluc, écolier, étant arrivé en retard, le déposant lui en aurait demandé la raison. Il aurait dit qu’étant à la Marine, il vit Philip Ardisson, qui jouait avec d’autres enfants, recevoir un coup de pierre ou plâtras. Peu après, Ardisson tomba par terre en s’agitant beaucoup sur son ventre. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et c’est soussigné. Chiris, juge Peillon Roustan, greff

 

Déposition de Jean Brest, fils de Barthélemy, marchand de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 10 à 11 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Brest, témoin assigné par le même exploit, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique des parties : A dit savoir qu’au mois de décembre dernier, jouant avec Philip Ardisson, Antoine Roustan et Philip Roustan, cousin du dit Antoine, le déposant serait aller verser de l’eau, et à son retour, il aurait trouvé le dit Ardisson renversé par terre tâchant de se relever, mais il ne pouvait pas, mordant le sable, et aurait dit au déposant qu’il avait reçu un coup au dessous du téton où il portait la main, et Antoine Roustan dit au déposant et à Jean Flory que Philip Roustan, son cousin, avait donné le coup au dit Ardisson, mais qu’ils se gardassent bien de parler parce qu’on les ferait aller devant monsieur le juge pour déposer. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et s’est soussigné. Chiris, juge, approuvant la rature d’un mot. Jean Brest, approuve la rature d’un mot. Roustan, greff

 

Déposition de Jeanne Escarras, femme d’Honoré Rouase, pêcheur de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 50 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constituée en personne, la dite Escarras, témoin assigné par le même exploit, dont elle nous a exhibé la copie, laquelle moyennant son serment, ouïe tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parente, alliée, servante ni domestique des parties : A dit savoir qu’étant un jour du mois dernier à la Marine, elle vit beaucoup de monde, et y ayant accourue, elle aurait vu que l’on portait le fils du querellant, mort, dans sa maison, et y étant allée, la déposante, aurait entendu dire que ce garçon était mort d’apoplexie, mais au sortir de là, elle aurait entendu dire par bruit commun que le fils de patron Claude Roustan aurait donné un coup de pierre au fils du dit Ardisson. Autre a dit ne savoir, et lecture à elle faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquise suivant l’ordonnance. Chiris, juge, approuvant la rature d’un mot. Roustan, greff

 

Déposition de messire George Raybaud, prêtre de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 56 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit messire Raybaud, lequel moyennant son serment « adpectris », ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique des parties : A dit savoir qu’il y a 7 à 8 jours, étant du côté de la Marine, il vit Pierre Roustan, fils d’Antoine, cousin germain de Claude Roustan, père du querellé, qui s’approcha du sieur Albert, maître d’école, et lui dit : Quoi ! après que le sieur Ardisson, père, est allé chez vous, pour obtenir de nos écoliers que Philip Roustan, mon neveu, avait donné un coup de pierre à Philip Ardisson, son fils, vous avez avec complaisance obligé l’un de vos écoliers de le déclarer de [casuiste] à coups de nerfs, et même vous avez battu mon fils pour cela. Albert, maître d’école, confus aurait marmonné quelques excuses. Le déposant se serait ensuite retiré chez lui où il aurait trouvé François Boulle, âgé d’environ 9 ou 10 ans. Lui ayant demandé des nouvelles d’Ardisson, fils, le dit Boulle lui aurait répondu qu’on l’avait enterré, mais qu’il n’était point vrai qu’il fut mort du coup de pierre reçu, mais bien d’un accident d’apoplexie, ajoutant le déposant que le dit Boulle lui dit encore que le fils de Louise feu Mouret était présent lors de la chute d’Ardisson sans avoir reçu aucun coup. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et c’est soussigné. Chiris, juge, approuvant la rature d’un mot. Reybaud, prêtre Roustan, greff

 

Déposition de Françoise Bense, femme de Jully Ferré de ce lieu de Cannes, marinier, âgée d’environ 30 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constituée en personne, la dite Bense, témoin assigné par le même exploit dont elle nous a exhibée la copie, laquelle moyennant son serment, ouïe tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parente, alliée, servante ni domestique des parties : A dit savoir qu’elle ne sait rien du contenu en la dite requête. Et lecture à elle faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquise suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Déposition de Marie Tournaire, femme de la Douceur, âgée d’environ 25 ans, le dit la Douceur, portefaix. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constituée en personne, la dite Tournaire, témoin assigné par le même exploit dont elle nous a exhibé la copie, laquelle moyennant son serment, ouïe tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parente, alliée, servante ni domestique des parties : A dit savoir qu’étant un jour du côté de la Marine, elle vit à environ 100 pas d’elle, courir beaucoup de monde, et y étant accourue, elle vit que c’était Philip Ardisson, fils du querellant, étendu par terre, faisant beaucoup d’écume de la bouche, croyant, la déposante, que c’était du mal caduc, lequel Ardisson ayant été porté dans la maison de son père, le sieur Raybaud, maître chirurgien fut appelé, et ayant examiné le dit Ardisson, il dit que c’en était fait de lui. En effet, il expira un peu après, et la déposante s’étant aidée à la dépouille pour luy mettre les draps mortuaires, elle reconnut que sur son corps, il n’y avait aucun coup. Autre a dit ne savoir, et lecture à elle faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquise suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Déposition d’Antoine Jourdan, patron de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 27 ans. Du premier février au dit an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Jourdan, témoin assigné par exploit d’aujourd’hui fait par Allieys, huissier, dûment contrôlé à Cannes, signé Preyre, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique des parties : A dit savoir que dans le temps qu’il descendait de dessus son bateau, au mois de décembre dernier, et cherchant du monde pour l’aider à tirer son bateau à terre, il vit tout d’un coup un garçon qui tomba mort à ses pieds faisant beaucoup d’écume par la bouche, et beaucoup de femmes étant accouru, une d’entre elles voulant le nettoyer avec son tablier, le sieur Marc Cavalier, bourgeois, lui aurait dit de le laisser en disant : ne voyez vous pas que ce garçon tombe du mal caduc. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquis suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Déposition de Jacques Roustan, fils de Pierre, patron de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 10 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Roustan, témoin assigné par le même exploit, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré être cousin second nommé de germain avec le dit Philip Roustan querellé, et nullement serviteur, ni domestique des parties, ni parent, ni allié du dit Ardisson : A dit savoir qu’étant un jour au mois de décembre dernier devant la maison de la demoiselle Aubin, veuve, avec d’autres enfants, et jouant avec une petite boule, il serait survenu Ardisson, et un peu après, il vit qu’il se porta la main sur le côté en criant plusieurs fois aïe !, et tomba par terre faisant beaucoup d’écume par la bouche. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquis suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Déposition de Jean Flory, fils d’Antoine, maître tonnelier de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 11 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Flory, témoin assigné par le même exploit, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à la charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré être parent avec le dit Roustan, ne sachant pas à quel degré, et nullement ennemi, ni serviteur d’aucune des parties : A dit savoir qu’un jour du mois de décembre dernier, allant au collège, il vit beaucoup d’enfants et de femmes en troupe et ayant demandé à Antoine Roustan, fils de patron Donat Roustan, ce que c’était, il lui aurait dit que Philip Ardisson était tombé par terre, faisant beaucoup d’écume par la bouche, et que Philip Roustan, son cousin lui avait donné un coup de pierre, mais qu’il se garda bien de rien dire parce que si on le savait, on les ferait déposer en justice. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et c’est soussigné. Chiris, juge, approuvant la rature d’un mot. Jean Flory Roustan, greff

 

Du 15 mars 1713, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constituée en personne Françoise Ricord, femme de patron André Raphel, de ce lieu de Cannes, âgée d’environ 42 ans, témoin assigné par exploit du dit jour fait par Allieys, huissier, dûment contrôlé à Cannes, dont elle nous a exhibé la copie, laquelle moyennant son serment, ouïe tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré être cousine d’alliance avec la femme du querellant, pour être toutes les 2 filles de 2 cousines germaines, et toutefois nullement domestique ni servantes des parties : A dit savoir qu’un jour du mois de décembre dernier avant les fêtes de la Noël, faisant peigner du chanvre, elle aurait vu venir vers elle Pierre Arluc, son beau-frère tout alarmé qui lui demanda où était Maître Hubert Ardisson, alors maire, parce qu’il avait vu un enfant mort en droiture de la maison du dit Ardisson, et la déposante y ayant accourue, elle trouva que c’était Philip Ardisson, fils du querellant, qui ayant le ventre à terre, s’agitait beaucoup, et la déposante s’étant abaissée pour le relever, et lui demander ce qui lui était arrivé, Ardisson en mettant ses 2 bras sur l’épaule, jeta un cri sans dire mot. Elle ajouta que son beau frère Arluc lui dit l’avoir entendu dire qu’il avait reçu un coup de pierre. Autre a dit ne savoir, et lecture à elle faite de sa déposition, a dit icelle contenir vérité et déclaré ne savoir écrire de ce enquise suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Déposition de Françoise Rouase, fille d’Honoré, patron, de ce lieu de Cannes, âgée d’environ 16 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constituée en personne, la dite Rouase, témoin assigné par le même exploit, dont elle nous a exhibé la copie, laquelle moyennant son serment, ouïe tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parente, alliée, servante ni domestique des parties : A dit savoir qu’après que le dit feu Philip Ardisson fut porté dans la maison de son père, Marie, fille de patron Donat Roustan, âgée d’environ 7 à 8 ans vint dire à la déposante que lorsqu’on donna le coup à Philip Ardisson, son frère était présent, et qu’il s’enfuit tout d’abord afin que l’on ne l’accusa d’avoir fait le coup. Autre a dit ne savoir, et lecture à elle faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquise suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Déposition d’Honorade Raphel, femme de Hierosme Bérengier, de ce lieu de Cannes, âgée d’environ 25 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constituée en personne, la dite Raphel, témoin assigné par le même exploit, dont elle nous a exhibé la copie, laquelle moyennant son serment, ouïe tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parente, alliée, servante ni domestique des parties : A dit savoir qu’elle a entendu dire par bruit commun, et entre autres, au fils de patron Donat Roustan qu’il jouait avec Philip Ardisson, Philip Roustan et autres enfants. Philip Roustan et Philip Ardisson ayant eu quelque querelle, Ardisson tira un coup de pierre contre Roustan, lequel répliqua en tirant un petit morceau de plâtras, puis s’enfuit. Peu après, revenu au même endroit, il aurait trouvé les dits enfants et même le dit Philip Ardisson qui jouait encore, lequel ayant voulu aller verser de l’eau au derrière d’un bateau, il tomba dans cet endroit par une défaillance, ayant encore les culottes à la main, ajoutant d’avoir encore entendu dire au fils de patron Roustan que Ardisson étant alors devenu d’une couleur noire, l’on disait qu’il avait été attaqué d’un accident d’apoplexie. Autre a dit ne savoir, et lecture à elle faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquise suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Déposition de Pierre Arluc, patron de ce lieu de Cannes, âgée d’environ 55 ans. Du 17 mars au dit an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Arluc, témoin assigné par exploit du 30 janvier dernier fait par Allieys, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique d’aucune des parties : A dit savoir que quelques jours avant les dernières fêtes de la noël, étant à la plage et travaillant tout contre son bateau qui était à terre, il s’aperçut que au-delà du bateau il y avait un garçon couché par terre qui pleurait, et le déposant s’en étant approché, il reconnut que c’était Philip Ardisson, et lui ayant demandé ce qu’il avait, il lui répondit qu’on lui avait donné un coup de pierre, et à l’instant, le déposant ayant accouru pour avertir la mère de ce garçon, il rencontra d’abord Françoise Ricord, sa belle sœur. Il lui raconta l’état où était le dit Ardisson, et à l’instant le déposant vit accourir une infinité de femmes qui furent prendre le dit Ardisson, et le portèrent chez son père. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir écrire de ce enquis suivant l’ordonnance. Chiris, juge. Roustan, greff

 

Soit communiqué au procureur juridictionnel.

A Cannes le dit jour 17 mars 1713. Chiris, juge Nous procureur juridictionnel soussigné, vu la requête de querelle présentée par Maître Hubert Ardisson, ci devant notaire, habitant en ce lieu de Cannes, avec le décret au bas de Soit Informé du 5 janvier 1713, exploit d’ajournement à témoins, fait par Allieys, huissier en l’amirauté du siège d’Antibes, résidant en ce lieu, du 30 janvier au dit an, contrôlé à Cannes le dit jour, signé Preyre, autre exploit d’ajournement à témoins fait à la requête du dit Ardisson par le dit Allieys, huissier, du premier février au dit an 1713, autres exploits à témoins fait aussi à la requête du dit Ardisson par le dit Allieys, huissier, du 15 mars au dit an, dûment contrôlés le premier février et 15 mars au dit an, signés Preyre et Gazan, cahier d’information prises par Monsieur le juge à la requête du dit Ardisson avec l’ordonnance au bas de Soit Communiqué au procureur juridictionnel des 31 janvier, premier février, 14 et 17 mars 1713, ensemble toute la procédure : Concluons à ce que le dit Philip Roustan, fils de Claude, querellé, soit pris et saisi au corps, mené et conduit aux prisons de ce lieu pour y être interrogé sur les faits de la procédure, et ne pouvant être pris, seront les exploits faits conformément à la nouvelle ordonnance. Délibéré à Cannes ce 17 mars 1713. J. Macarri Nous, juge, vu le présent cahier d’information, les conclusions du procureur juridictionnel, et toutes les pièces de la procédure y énoncées, ordonnons que Philip Roustan, fils de Claude, querellé, sera pris et saisi au corps, et de suite traduit aux prisons de ce lieu, pour y être interrogé sur les faits de la procédure et autres que besoin sera, et y être détenu jusqu’à ce que par nous, soit ordonné, et ne pouvant le dit Roustan être saisi, seront faits les exploits de perquisition de sa personne, et annotation de ses biens aux formes de l’ordonnance, et au surplus, qu’Antoine Roustan, écolier, parent du querellé, le fils de Donat Roustan, Jacques Arluc, écolier, du sieur Peillon, maître de la petite école, et le fils de Louise feu Mouret, soient assignés par devant nous, pour répondre sur ce dont ils seront par nous interrogés. A Cannes, le susdit jour 17 mars 1713. Chiris, juge

 

Déposition d’Antoine Roustan, fils de patron Donat de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 11 à 12 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Roustan, témoin assigné par le même exploit, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à la charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré être cousin germain du querellé, et nullement serviteur, ni domestique des parties, ni parent, ni allié du dit Ardisson : A dit savoir qu’un jour du mois de décembre dernier, le déposant jouait avec une petite boule avec feu Philip Ardisson et autres enfants, et le déposant ayant quitté le jeu pour s’en aller, puis s’étant retourné, il aurait vu Philip Ardisson ayant la main sur le côté, et proférant des paroles plaintives, et ayant fait quelques pas, le nommé patron Pierre de (Sainte) Marguerite lui ayant demandé ce qu’il avait, le dit Ardisson lui répondit qu’on lui avait donné un coup de pierre, le déposant l’ayant entendu dire de la sorte à Jacques Arluc, ayant aussi entendu dire par bruit commun que Philip Roustan avait donné le coup de Pierre au dit Ardisson. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de sa déposition, y a persisté comme véritable et c’est soussigné. Chiris, juge, approuvant la rature d’un mot. Antoine Roustan Roustan, greff

 

Déposition de Jacques Arluc, fils de Jean, pêcheur de corail de ce lieu de Cannes, âgé d’environ 10 à 11 ans. Du dit jour et an, au lieu, à la requête, et par devant qui dessus, constitué en personne, le dit Arluc, témoin assigné par le même exploit, dont il nous a exhibé la copie, lequel moyennant son serment, ouï tant à charge que décharge sur le contenu en la dite requête dont lecture lui a été faite, et après avoir déclaré n’être parent, allié, serviteur ni domestique des parties : A dit savoir qu’il y a environ un mois et demi, allant en classe et passant du côté de la Marine, il vit Philip Ardisson couché sur son ventre sur le sable qui dit au déposant : l’on m’a donné un coup de pierre au dessous du téton. Autre a dit ne savoir, et lecture à lui faite de la déposition, y a persisté comme véritable et déclaré ne savoir encore écrire pour signer. Chiris, juge, approuvant les 3 ratures de 5 mots. Roustan, greff

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